CAHIER N° 148

Philippe FORAY - Claude LATTA

Aux sources de la République :
La laïcité, une question d’actualité La Séparation des Églises et de l’État

Introduction
Deux conférences pour réfléchir et pour agir
Janvier 2015, la tuerie de Charlie Hebdo, la prise d’otages, les assassinats. La barbarie, suivie de la stupéfaction puis très rapidement d’une réaction, forte et digne, à Montbrison, dans le Forez, comme partout en France. Affirmer sa solidarité avec les victimes et leurs proches, être unis face au terrorisme, refuser l’engrenage de la violence, rejeter toutes les haines. Le besoin d’être ensemble aussi, d’affirmer notre volonté de promouvoir la fraternité, le vivre ensemble, le faire savoir, le mettre en œuvre.
Des échanges informels ont eu lieu, au départ, entre nous, entre citoyens : comment expliquer, comment résister à la fois à la sauvagerie et à la montée des incompréhensions, des tensions, des stigmatisations ? Comment bâtir sur notre lieu de vie des actions pour favoriser ce vivre ensemble ? Un groupe, Initiatives citoyennes, s’est formé dans le Montbrisonnais et s’est réuni à plusieurs reprises pour que ses membres, venus d’horizons divers, puissent se connaître et réfléchir aux possibilités d’action.
Dans un premier temps, nous avons ressenti le besoin de nous réapproprier notre organisation sociale, d’aller aux sources mêmes, aux fondements de la République, de nous pencher sur la laïcité, sur la séparation des Églises et de l’État qui font partie des fondations de notre République. D’où les deux soirées programmées les 7 et 14 octobre 2015 : La laïcité, une question d’actualité, avec Philippe Foray, La séparation des Églises et de l’État, avec Claude Latta. Lors des conférences, l’éventualité de leur publication a été envisagée. Grâce aux deux intervenants, c’est désormais chose faite. Nous les en remercions.
Notre collectif envisageait des suites à bâtir ensemble, pour mieux se connaître avec nos diversités d’origines, de religions, d’opinions, avec nos multiples différences qui peuvent être porteuses d’autant de richesses. Un ensemble d’animations ouvertes à tous et à toutes les différences, dans le respect de chacun était envisagé.
Les dramatiques événements du 13 novembre 2015 en région parisienne, l’escalade de violence en divers points de la planète, la montée des extrémismes religieux, nationalistes, des réactions indignes face aux phénomènes migratoires, rendent notre projet essentiel. Il devra s’adapter à une situation mouvante, qui va encore évoluer.
En attendant, cette publication nous invite à réfléchir et à nous donner des bases pour l’action. À nous, dans le Montbrisonnais, d’écrire modestement notre part d’histoire.

Le 19 décembre 2015
Jacques Martinez

Quelques réflexions pour conclure
La loi de Séparation a, historiquement, tiré sa force d’un paradoxe apparent : ferme sur les principes, née dans l’affrontement, considérée à sa naissance comme une loi de combat, elle a été rédigée et appliquée de façon suffisamment libérale – pensons à l’arrêt des inventaires ou aux accords de 1923 sur les associations diocésaines – pour devenir une loi de consensus. Elle s’est révélée suffisamment claire pour régler les problèmes avec d’autres religions que le catholicisme et suffisamment souple pour s’adapter à des situations nouvelles et être complétée sans qu’elle ait besoin d’être remplacée. La laïcité, liée à la séparation des Églises et de l’État, est constitutionnelle. L’article 1er de la Constitution de 1958 dispose : « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. » La laïcité s’impose donc à tous parce qu’elle donne des règles de vie communes à tous les citoyens. Elle s’impose à toutes les églises. Aucune Église ne peut imposer ses règles dans un pays où cohabitent croyants de diverses confessions, indifférents et athées. L’Église catholique a dû accepter la loi Simone Veil sur l’IVG (Interruption Volontaire de Grossesse). Malgré l’ampleur de leurs rassemblements, les manifestants (en très grande majorité catholiques) de la « manif pour tous », ont dû accepter l’ouverture du mariage aux homosexuels. Les musulmans ont dû accepter la loi sur les signes religieux à l’école. De même, des « coutumes » sans doute d’origine religieuse ont-elles été interdites : ceux qui, issus de communautés africaines ou asiatiques pratiquent encore, dans un contexte animiste, l’excision des petites filles sont passibles de la cour d’assises.
La loi de Séparation permet l’application du principe de laïcité. Disons-le encore une fois : elle permet et assure la primauté de la loi civile sur les lois religieuses. Elle est une chance extraordinaire pour la France et il faut croire dans les vertus émancipatrices de la République. Il faut croire dans le dialogue avec les religions et entre les religions et dans l’évolution des religions qui, comme toutes les choses humaines ont plusieurs aspects : elles sont le lieu de l’épanouissement spirituel des croyants mais comportent aussi un risque de fanatisme. Mais pour faire vivre la laïcité nécessaire à notre société, il faut avoir une volonté, sans laquelle il n’y a pas d’action publique et cette volonté doit s’imposer à tous. Il faut aussi de la fraternité : sans elle la République n’existe pas. Initiatives Citoyennes

Initiative citoyenne
Centre social
de Montbrison

Cahiers de Village de Forez 2015
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Espace citoyen