CAHIER n°81

Claude Latta,

L'appel du 18 juin 1940,

Ce texte a été rédigé à l’occasion du 70e anniversaire de l’appel du 18 juin 1940 et de sa commémoration par la Ville de Montbrison.

L’Appel du 18 juin 1940 au cœur de la tourmente
Histoire et mémoire
Il y a 70 ans, courait sur les ondes de la BBC l’appel du général de Gaulle. Cet appel se situe au cœur d’un désastre national et, pour en comprendre l’importance historique, il faut naturellement le replacer dans les événements de mai et juin 1940 et surtout dans la période qui va du 16 au 25 juin. Nous essayerons de répondre aux questions suivantes : dans quelles circonstances et par qui cet appel a-t-il été lancé ? Quelle est la teneur de cet appel ? Quelles en furent la portée et les conséquences ? Pourquoi et comment est-il entré dans la mémoire nationale ?
Notre propos ne se limite pas, on s’en doute, à l’étude de l’appel du 18 juin lui-même mais englobe celle des appels lancés dans les jours suivants, et tente d’en expliquer l’importance et la portée par l’évocation de la période mai-juin 1940 - dont la chronologie est très importante - et surtout par l’étude des événements dramatiques de la semaine terrible qui est bornée par les dates des 16 et 25 juin 1940. Mais d’abord : quels sont les textes ?
Avant-propos : les documents et les textes

La BBC n’a pas enregistré l’appel du 18 juin 1940 : même si nous connaissons la teneur de l’appel, nous ne savons pas vraiment, au mot près, ce que le général de Gaulle a dit. Les documentaires lui substituent souvent l'appel du 22 juin (dont l'enregistrement, lui, nous est parvenu) mais sans toujours préciser qu'il ne s'agit pas, et qu'il ne peut s'agir, de celui du 18. Si la teneur des deux appels des 18 et 22 juin est assez proche, quant au fond, elle n’est cependant pas la même parce que le 22 est le jour même de l’armistice franco-allemand dont les conditions viennent d’être connues. L’appel du 22 est plus long et plus argumenté. Par ailleurs, l'appel du 18 juin est souvent confondu avec le texte de l'affiche « À tous les Français » qui fut placardée sur les murs du Royaume-Uni à partir du 3 août 1940. Le texte de l’affiche commence par : « La France a perdu une bataille mais n’a pas perdu la guerre ! » formule devenue célèbre. Mais cette phrase n’est pas dans l’appel du 18 juin.
Ces textes des discours du général de Gaulle et le texte de l’affiche ont été aussi publiés en première page du n° 1 du Bulletin officiel des Forces françaises libres le 15 août 1940. Ces documents -manuscrit de l’appel du 18 juin, enregistrement radiophonique du 22 juin, affiche du 3 août 1940 - ont été, le 18 juin 2005, classés par l'UNESCO parmi les documents du patrimoine documentaire d'intérêt universel – qui correspond pour les textes à l’inscription, pour les monuments, au patrimoine mondial de l’humanité. L’inscription a été proposée conjointement par l’Institut national de l’audiovisuel (INA) et par la BBC.
Une précision peu connue à propos de l’appel du 18 juin : le texte a été rédigé le 18 juin 1940, mais on sait depuis 1986 qu'il ne fut pas diffusé tel quel, le gouvernement britannique ayant imposé quelques remaniements. Les archives du cabinet britannique ont, en effet, révélé que la phrase du début de l’Appel a été remaniée - nous y reviendrons. Ce texte remanié est authentifié par la version des services des écoutes radiophoniques de Berne, en Suisse, qui en ont fait une transcription et par les articles de presse publiés en France le 19 juin. Le général de Gaulle obtint néanmoins que le texte originel de son appel du 18 juin, non remanié, soit distribué à l’agence Havas et aux journaux et publié par la presse britannique du lendemain 19 juin.
La campagne de France en 1940
C'est le texte originel du 18 qui figura ensuite dans les collections polycopiées des discours du Général conservées à Carlton Gardens , puis dans toutes les éditions des Discours et Messages à partir de 1941, le discours initial faisant seulement défaut dans les « Archives écrites » de la BBC. Il y a donc deux versions de l’appel du 18 juin, l’une pour la BBC, l’autre pour l’Histoire.

Collection "Histoire et citoyenneté